Je montre Ce moment particulier qui a pour objet la
communication, existe tout naturellement quand les ateliers du matin sont terminés.
Certains enfants ont construit quelque chose avec les jeux de
construction. Il leur est donc proposé de les montrer
au groupe. Certains montrent, d’autres
nomment ou expliquent . Il peut aussi avoir lieu en fin de
matinée ou en fin d’après- midi suivant l’organisation mise en place.L’objet
montré ( construction, bricolage, modelage ) a été « fabriqué ».
Il peut aussi venir de la maison. Le présentateur s’expose au
questionnement du groupe : qu’est-ce que c’est ? Comment tu as
fait ?Pourquoi tu les as mis comme ça ? Cette parole doit donc se construire,
être réfléchie et argumentée. Voici une grille de constats possibles
pendant les manipulations puis pendant la communication. La mise en relation
des deux types de constats permet d’affiner un regard et une écoute de
l’enfant dans le respect de son identité pour l’aider à évoluer à son rythme. |
Tâtonnement
Expérimental
Proposition d’une grille
de constats possibles
dans
l’action |
dans
la parole |
l’enfant
a |
|
essayé un nouveau
matériel |
posé une question, un
problème |
utilisé une nouvelle
stratégie |
proposé une stratégie |
réalisé une construction
nouvelle |
proposé une hypothèse |
réalisé une construction
différente |
proposé un processus, un
protocole |
fait varier une variable |
proposé une expérience,
un matériel |
vérifié une hypothèse |
proposé une solution |
réalisé plusieurs constructions
différentes autour d’un seul problème |
fait une relation
d’analogie |
réalisé une construction
dans laquelle les étapes sont successivement dépendantes l’une de l’autre |
fait une relation de
cause à effet |
réalisé une construction
de transfert ( situation ou matériel
différents ) |
commencé à généraliser |
travaillé seul, à deux, en groupe |
échangé, |
|
donné un exemple |
cherché de la doc |
un contre-exemple |
|
expliqué, argumenté |
regardé un modèle |
demandé de l’aide |
Tâtonnement
Expérimental en Maternelle
L’enfant de 2 à 6 ans construit son
rapport au monde et au savoir par la vue et par le toucher. Il est
naturellement curieux et ,dès qu’il voit quelque chose qu’il ne connaît pas,
il cherche le plus souvent à le toucher
, à le manipuler dans tous les sens, pour
voir à quoi ça peut servir ou « comment ça marche ». L’adulte peut
éventuellement être la personne ressource qui peut le renseigner mais la
manipulation reste un besoin . Cela l’aide probablement à créer un lien
charnel avec l’objet et sa manipulation lui permet d’être l’auteur d’essais
qui ne prennent sens que lors de leurs réalisations, sans finalité apparente.
C’est souvent pendant cette phase d’appropriation que l’enfant est amené à
faire une recherche parce
qu’il se passe quelque chose qu’il n’avait pas prévu . Cela le pousse alors à
continuer « pour voir ». S’il ne la sollicite pas, l’intervention de l’adulte risque de
briser la recherche de l’enfant. Celui-ci a besoin de temps pour Essayer, autant de fois
qu’il le souhaite, comme il le désire, à sa façon. Très souvent, quand il estime avoir terminé, il va
vers l’adulte pour lui montrer ce qu’il a fait. Et c’est à ce moment là que la parole peut aider l’enfant à
analyser sa démarche et le résultat obtenu. C’est pendant cette mise
en mots que vont apparaître : les hypothèses, les erreurs, les obstacles
rencontrés ou négligés, les choix et leurs justifications. C’est dans cet
échange que l’enfant va prendre du recul, qu’il va percevoir le pourquoi et le
comment de son action , et qu’il va y réfléchir. Cet à ce moment que l’adulte
peut questionner pour aider l’enfant à dire par où il est passé et pourquoi
et qu’il peut ensuite lui proposer une autre piste, un questionnement, une
trace à réaliser et, bien sur , un retour au groupe. Si cette phase de manipulation se passe en groupe
des échanges peuvent avoir lieu, ou non, des imitations et des conflits ! Le groupe
signifie : organisation et
partage du matériel à disposition, regard et parole sur l’objet ou sur l’Autre. A cet
âge là ( et même plus tard ! ! ) les règles de l’échange restent à
construire. Certains enfants
ne s’occupent pas des autres créations et poursuivent leur cheminement
pendant un bon moment sans tenir compte , apparemment, des autres. D’autres
regardent ce qui se fait et cherchent à imiter quelque chose qui leur
convient ou quelqu’un qu’ils aiment bien. Il leur arrive d’ailleurs à partir
de ce modèle de dévier volontairement ou non. Ce qui provoque alors un
échange plus ou moins vif : « Il a fait pareil que
moi ! » , « Il voulait faire pareil mais il s’est
trompé ! ». Le statut du
modèle et de l’erreur sont alors sujets à débat et permettent de construire
aussi bien la notion de respect de l’autre que celle du savoir en construction. A cet âge la notion de recherche prend son sens à partir de
questions ou de productions d’enfants . L’enfant de
maternelle ne possède pas encore la possibilité d’anticiper sur quelque chose
qui lui est extérieur. Il est capable de chercher dans l’instant une réponse
immédiate à une question qui lui est posée mais cela relève pour lui de
l’évidence . Il énonce une vérité, ou un refus, mais il ne sait pas encore
« rebondir » dans un raisonnement, dans une abstraction. Il ne construit
pas encore les liens de cause à effet sans un support concret qui l’aide à
les percevoir . Souvent même, la réalité d’un fait qu’on lui montre, lui
reste extérieure et le non –sens ne le gêne pas. Il trouve une autre
explication parce que sa connaissance de la logique ( ou des lois de la
physique ) n’est pas suffisante pour qu’il puisse imaginer qu’il est dans
l’erreur. Sa perception du monde et des
phénomènes naturels est très différente de celle de l’adulte . Il lui faut donc passer par l’expérience personnelle pour
construire des représentations qui relèvent de la réalité et non plus de
l’imaginaire. Certaines
situations répétitives peuvent l’amener l’enfant à construire une recherche
qui lui est extérieure au départ : 1 - les situations de rituels : la date, le nombre de présents, la préparation de la
journée, le bilan. Certains enfants adhèrent tout de suite à
ces échanges quotidiens et possèdent les démarches de recherche nécessaires . D’autres n’en perçoivent pas tout de suite le sens
mais au fur et à mesure de l’année ils perçoivent les stratégies utilisées
par leurs camarades et ils peuvent alors commencer à construire les leurs. 2 - les situations
de besoin dans le fonctionnement de la classe : apporter le nombre de
« crayons » nécessaires au groupe, organiser les tables pour un atelier,
gérer le rangement de la BCD de la classe, le prêt de livres, le nombre de
places ou de participants à une activité etc.. Ces situations ne sont pas forcément gérées au
Conseil , en grand groupe ou avec l’aide de l’adulte. Elles sont génératrices
de problèmes « Vrais » , authentiques et incontournables. Chaque
enfant (ou groupe d’enfants ) concerné est obligé de se mobiliser et de
mettre en œuvre toute ses facultés de recherche et de raisonnement pour
essayer de trouver une solution. Le Tâtonnement
Expérimental en cycle 1 passe donc par une grande liberté accordée à l’enfant
pour qu’il puisse vivre des situations de recherche personnelles ou en
groupe. La répétition des situations, libres ou organisées,
aide l’enfant à faire évoluer à son niveau les représentations qu’il possède. La place de
l’enseignant est souvent reliée à l’émergence d’une parole qui favorise chez
l’enfant la prise de conscience de la réalité du monde et des autres. Cette parole permet la construction de la pensée de
chacun ,à son rythme . Françoise DIUZET juillet
2002 |