Connaissance
du monde
En ces temps de doutes, sur l’élaboration d’une culture
commune, d’une recherche de repères pour des enfants qui ne se sentent pas
concernés par le système scolaire et qui ont tendance à se tourner vers les
images virtuelles, il semble important et même fondamental de voir l’école
s’inscrire dans un projet scolaire axé sur la vie, sur le monde qui
l’entoure. L’enfant est naturellement curieux de ce qui l’entoure Il pose des questions sur le pourquoi et le comment des choses . Ecouter ce qu’il dit et chercher des réponses à ses questions permet souvent d’aborder le fondement des connaissances que l’école doit lui apporter Alors
pourquoi ne pas commencer par regarder autour de soi ? Dans
la cour de l’école : les arbres, fleurs ,petits animaux, bâtiments,
cailloux, matériaux, routes etc… Pourquoi
ne pas observer ce que devient chaque objet de cet environnement en
fonction des saisons, du temps qu’il fait et du temps qui passe. Retrouver un sens , une chronologie dans ce qui nous entoure,
le comparer à des ailleurs différents dans leurs différences ou dans leurs
ressemblances peut conduire à trouver ce qui reste commun, immuable et
peut-être essentiel. Chaque
mois apporte son cortège d’événements naturels que les hommes ont fêté à
leur façon en utilisant les ressources du moment. Retrouver cette observation
du monde, la décrire, la communiquer aux autres, se questionner sur le
pourquoi ou l’ordre des choses redonne un sens authentique à la connaissance qu’aucun manuel ou
qu’aucune fiche pédagogique ne saurait construire. Le regard que l’enfant porte sur le monde peut être éduqué,
porté vers la reconnaissance de ce qui est, de ce qui bouge, de ce qui change
et de ce qui demeure permanent. C’est par cette attention au monde que l’on peut retrouver les
concepts essentiels qui sous tendent et organisent toute chose . Par
cette reconnaissance l’enfant peut s’inscrire dans l’histoire du monde mais
aussi dans celle des hommes qui ont vécu dans ce monde. Il
peut trouver une place et une appartenance qui souvent ne sont plus
construites dans les familles. La maternelle est certainement un espace privilégié qui peut
permettre de construire des savoirs mis en réseaux et en résonance à partir
de l’écoute de l’enfant et du dialogue avec lui. Lui
donner les mots est essentiel : pour lui décrire ce qui l’entoure, pour
expliquer les particularités de chaque chose, les propriétés, les analogies,
les différences, les ressemblances . D’autres
mots sont nécessaires pour l’aider à s’expliquer, à dire ce qu’il a fait ou
ce qu’il a compris et c’est en voulant partager ses questions et ses réponses
qu’il va les acquérir. Il est donc important de lui
offrir des moments pour le faire, pas n’importe quand, pas tous en même
temps, des moments ou la parole est possible, organisée, respectée et
garantie et cela dans une répétition qui lui rend possible l’anticipation,
qui lui permet de projeter un futur dans lequel il peut s’inscrire. Chaque
mois est singulier et permet de parler d’un petit morceau du monde. |
Septembre : C’est
la rentrée ; il fait encore beau et même parfois chaud. C’est encore
l’été ! On porte des vêtements légers ; il n’y a pas grand chose
sur le porte - manteaux. C’est
le mois des vendanges, du raisin mais aussi des labours. Il y a encore des
fleurs et des animaux à regarder. On
a fait la photo de la classe dans la cour sous le grand arbre .On
recommencera chaque mois au même endroit. On
va organiser un goûter pour ceux qui n’ont pas assez mangé le matin . Nous
commençons une nouvelle année scolaire. Qu’allons nous apprendre cette
année ? Et comment allons – nous travailler ? Nous allons faire
un journal pour raconter à nos parents
ce que nous avons fait. |
Octobre : Il
commence à faire un peu plus frais le matin et la nuit tombe un peu plus
vite. Les
hirondelles se sont rassemblées sur les fils électriques pour partir
dans les pays chauds. On va allumer le chauffage. On regarde les arbres quand
on va à la BCD.Les feuilles jaunissent et certaines sont tombées. Nous
avons commencé à nous organiser et nous savons utiliser certains matériels.
Nous savons ou les prendre et ou les ranger. Nous
avons commencé à nous parler en groupe et nous aurons des
correspondants ! On a un modèle pour écrire notre prénom en petites
lettres. On
a inventé une comptine avec les prénoms de la classe. A la fin du mois ce
sera la fête d’Halloween et nous serons en vacances. |
Novembre : Pendant
les vacances on a changé d’heure. Il fait nuit beaucoup plus tôt le soir. Le
matin on met un manteau parce qu’il y a du vent et souvent il pleut. Vivent
les bottes et la capuche ! On a fabriqué un petit moulin. Les
feuilles tombent. On va en ramasser pour les regarder et les mettre à sécher.
Il y en a de toutes les tailles et de toutes les couleurs. En forêt on peut
ramasser des châtaignes et au marché on trouve beaucoup de pommes et de
poires. Les animaux font des réserves. Nous
sommes capables de faire du dessin, de la peinture, de la pâte à modeler, du
découpage tout seuls ! On
commence à savoir trouver des mots dans le cahier et on sait souvent trouver
combien il y a d’enfants présents ou absents. On
a reçu une lettre des correspondants. On va leur répondre. Et maintenant le
jeudi on joue à la marchande avec des choses qu’on fabrique. |
Décembre : Ca
y est il fait froid et il fait nuit après la classe. On a tous des manteaux. Il
n’y a plus de feuilles sur les arbres. C’est l’hiver. Ce
sera bientôt Noël. On va fabriquer des décorations pour décorer la classe. On
a apporté des pub pour regarder les mots et les déco de Noël. On
va écrire au Père Noël. Et on apprend à écrire Noël en attaché. On
a lu des devinettes de Noël. On
va faire un marché de Noël pour les autres classes. On prépare des affiches,
on découpe des images de Noël dans du papier cadeau et on prépare leurs
porte-monnaie. On a préparé quelque chose qu’on va rapporter à la maison. Le Père Noël doit
venir à l’école ! On va être en vacances… |
Janvier : Il
fait drôlement froid. On porte des gants et un bonnet ou une écharpe. Dehors
il y a du verglas par terre et les oiseaux n’ont plus rien à manger. Le
thermomètre marque 0. On a mis des pots avec de l’eau dehors. L’eau a gelé. On
a écrit une carte une carte de Bonne année aux correspondants. On
va fabriquer chacun une couronne et on mangera une galette des rois. On a lu
beaucoup de recettes . On va en choisir deux différentes pour pouvoir
comparer les galettes. Et on va compter les parts pour voir combien de
galettes il faut cuire. On
va faire des tests pour montrer à nos parents ce qu’on sait faire. |
Février : On
commence à voir des bourgeons sur les arbres. On
parle du carnaval et des déguisements. On va fabriquer un masque. Il
y a beaucoup de modèles dans les livres de la classe. On
va faire des crêpes et c’est nous qui allons faire la pâte.. On a fait une
liste de ce qu’il nous faut. Chacun va apporter un ingrédient. Il faut des
boîtes de 6 œufs. On va faire au moins deux douzaines de crêpes. On
va jouer au loto pour se préparer au loto de l’école. Après
les vacances on ne restera pas beaucoup à la sieste si on n’est pas fatigué. |
Mars : Il
commence à faire un peu plus doux. Il y a des gros nuages gris ou noirs et
des grosses averses mais il y a aussi du soleil. On
commence à voir des fleurs et quelques bourgeons s’ouvrent dans les arbres.
Les oiseaux chantent beaucoup parce qu’ils veulent faire des nids. C’est le
printemps. On
commence à écrire des mots en attaché et on essaie de raconter les livres
qu’on a lus. On compte souvent plus loin que 10 parce que ce sont des mots
qui ne sont pas faciles à retenir. On compte aussi à l’envers. On cherche à apprendre le nom des fleurs à les écrire et à les dessiner. Elles sont différentes. Elles n’ont pas le même nombre de pétales. |
Avril : On
a changé d’heure. Il fait jour jusqu’au dîner. Il
y a des fleurs dans les arbres et après il y a plein de feuilles toutes
vertes. Poisson
d’avril ! On a dessiné ses écailles et on a inventé un calligramme
autour. Des
fois il fait un peu chaud. On a fait des jeux de mots. On
a fait des mots croisés avec des mots de Pâques. Il fallait bien regarder les
lettres . On a fait une poule , un poussin, une cloche ou un lapin en plâtre(
ou autrement !) que l’on a décoré à la peinture avec des petits pinceaux
fins . Il fallait faire bien attention. Après les vacances on aura tous un
cahier d’écriture avec des petites lignes |
Mai : Le
premier jour personne ne travaille. C’est le mois du muguet qui porte
bonheur. Il commence à faire beau ; il n’y a plus de chauffage.
On regarde les ombres dehors et les cerises qui poussent. On va voir les
correspondants ! ! C’est
aussi le mois de la fête des mères. Qu’est-ce qu’on va lui offrir ? Il
faudra écrire « Bonne Fête maman » en attaché et inventer une
poésie ? On
commence à préparer une danse pour la fête de l’école. On
fait des fiches avec des problèmes. Il faut chercher ce qu’il y a à compter |
Juin : C’est
le dernier mois ! Il fait chaud. L’été arrive et le CP aussi. On
vient en T. shirt et on apporte un chapeau ou une casquette. On
joue avec de l’eau et on fabrique des bateaux. On
écrit et on danse tous les jours parce qu’on va faire la kermesse. On
choisit les costumes et on les prépare. On
va faire des tests pour montrer ce qu’on sait faire pour aller au CP. Des
mamans viennent nous aider à faire des
fleurs en perles. Il faut préparer 20 perles pour chaque pétale ! On
va visiter le CP. On parle de comment on travaillera l’année prochaine, de ce
que l’on sait déjà et de ce qui va changer. On range… |
.
Ce
calendrier événementiel n’est bien sur pas à prendre au pied de la lettre
mais à raccorder à la vie. S’il
neige en décembre c’est à ce moment là que l’on parlera de la transformation
de l’eau et qu’on mettra les pots et le thermomètre dehors. Si
cela se produit en février c’est en février qu’on le fera. Le
moulin à vent ou le cerf-volant seront proposés un jour ou il y aura du vent
et le ramassage des feuilles quand elles seront tombées ! ! Certaines
activités prendront plus d’importance une année parce que les enfants seront
particulièrement intéressés par le sujet et moins une autre année. Les
animaux qui prennent une place particulière dans l’univers affectif de
l’enfant sont la base de recherches,
comparaisons, classements. Les représentations mentales et graphiques
des enfants permettent des échanges et des rebondissements souvent
imprévisibles et intéressants. Le
temps est aussi rythmé par les dates de vacances scolaires qui ne sont pas
toujours programmées au même moment. Il
y a alors plus ou moins de temps pour parler du carnaval ou du poisson
d’avril. Et après la fête, adieu le saint ! Sauf exception… Mais il est important que les mois soient spécifiés et
singularisés, que chaque saison prenne une couleur particulière, que les
fêtes soient nommées et fêtées avec le calendrier. Pas
de galette des rois à Noël ! Il ne faut pas oublier les anniversaires et les spectacles. Les
projets de classe vont se rajouter parce qu’il y aura eu apport ou
questionnement d’un enfant, des correspondants, d’une lecture ou d’une
rencontre. Les
sujets ne manquent donc pas et ils permettent quand ils sont réfléchis,
anticipés, prévus ( mais non obligatoires) de rebondir rapidement vers une
structuration des connaissances, vers des compétences à acquérir . On
voit rapidement que chacun apporte son lot de lectures différentes, de mots,
cartes, lettres ou affiches à écrire, d’objets à construire, de calculs à
faire et d’échanges à organiser pour que le temps se structure et permette
une place à tous et à chacun ! Chaque mois on remplit le calendrier et on le colle dans le
cahier. Le
problème est essentiellement de gérer le temps pour que chaque domaine soit
exploité au mieux et de gérer des
outils de constats (
grilles à cocher par l’enfant qui a terminé ou par l’adulte qui regarde ) à
chaque réalisation, pour savoir qui sait, ou ne sait pas, faire ceci ou cela
. Cette évaluation suivie et régulière de chacun permet que
l’enfant comme l’adulte se construise une vision d’ensemble et puisse
raccorder systématiquement les projets, les réalisations et les compétences
acquises. Cela donne sens aux savoirs scolaires et montre que toute
réalisation fait appel à une nécessité de compétences. Cette
vie de classe sera donc articulée sur le temps qu’il fait et le temps qui
passe, sur la gestion du temps que l’on utilise pour faire vivre telle ou
telle demande. Cette
demande va apporter une richesse individuelle ou collective, un savoir faire
qui sera apprécié, partagé . Elle
sera explicitée, raccordée à des outils de gestion de savoirs que les enfants
utilisent et maîtrisent. Le
monde et ses objets, temporels, géographiques, biologiques, historiques ,la
connaissance du monde dans toutes ses dimensions permettra à chacun de se
situer et d’avancer dans son histoire personnelle, de progresser dans la
construction de sa personnalité , de son rapport à l’autre, et de ses
connaissances. L’échange
et la mise en réseaux de tous les questionnement sur le monde donnent une
base riche, variée et solide aux savoirs en construction. Janvier 2003 - F . DIUZET |